27 mai 2011

Cours de formation pour Leaders Yanomami


Du 20 au 28 avril, eut lieu le 3e cours pour Leaders Yanomami des rivières Marauiá et Demini. Furent invités trois représentants de chaque xapono, Leader traditionnel, AIS et Agent agroflorestal. Durant le voyage, nous avons également invités les Yanomami du Venezuela, proches parents des habitants du Kona. Ils répondirent positivement à notre invitation, faisant un long voyage avant de nous rejoindre. Étaient aussi présents trois représentants des xapono d'Ajuricaba et Komixipiwei de la rivière Demini.

Le cours permit de traiter des thèmes comme l'entrée en fonction de la SESAI, qui selon un récent décret ne sera pas effective avant la fin de l'année, le droit des indigènes et le concept de citoyenneté. Mais il permit surtout d'établir un diagnostic précis de la réalité des Yanomami. Alors que depuis quelques temps déjà, la Secoya constatait un découragement de leurs parts, submergés par les difficultés, perdant toute autonomie face aux programmes paternalistes du gouvernement, le travail accompli durant cette semaine ainsi qu'un bel esprit d'union leur redonna envie de lutter.
Ainsi ils décidèrent de former une commission de trois personnes pour se rendre à Boa Vista et solliciter une réunion avec la personne responsable du District Sanitaire Yanomami. Le but fut de remettre un document dénonçant les graves problèmes de santé du Rio Marauiá et demander la venue urgente des personnes responsables afin qu'elles puissent se rendre compte de la réalité et expliquer de vive voix comment se déroulera la transition entre la FUNASA et la SESAI.

 

Aux dernières nouvelles, la commission présente à Boa Vista n'a rencontré que brièvement la responsable. Celle-ci ne donna aucune information pertinente et ne répondit pas aux sollicitations des Yanomami.

 

Les Leaders Yanomami élaborèrent également un second document afin de dénoncer la situation de travail esclave dont sont confrontés les habitants du xapono d'Ixima. En 1998, 96 Yanomami quittèrent le xapono afin de travailler dans l'extraction de la Piaçaba. Cette dernière année, plusieurs familles sont revenues, témoignant de l'exploitation dont elles ont été victimes, l'engrenage de dettes sans fondements, la vente illégale d'alcool aux indiens, les abus sexuels…Ce document sera remis au Ministère Publique afin de déposer une plainte pénale.

 

Au terme de ce cours, et ce malgré la gravité des situations abordées, je garderai en mémoire certains moments extrêmement forts, comme la nuit de chants et de danses pour donner la bienvenue aux parents du Venezuela, les rires durant les activités récréatives ponctuant le cours et la fête de clôture, symbole de partage et d'union entre les Yanomami.


4 mai 2011

Après avoir passé deux mois en terre indigène yanomami, je suis de retour à Manaus. Suite à une longue période de silence, je vous donne enfin de mes nouvelles afin d’expliquer les prémices du travail d’éducation en santé et relater les divers événements survenus durant ce temps.

Avant de partir, il a été prévu que je passe deux semaines dans quatre xapono (villages) avec les professeurs de la Secoya. Le premier xapono fut Puckima Cachoeira, village que nous avons atteint après deux jours de bateau à moteur. Accompagnée de la professeur Claudia, nous avons dans un premier temps visité chaque famille afin de connaitre la situation de santé du xapono. Rapidement nous avons pu percevoir que de nombreux Yanomami souffraient de problèmes cutanés importants, certaines mères de familles nous ont aussi confiées que leurs enfants avaient la diarrhée. Nous avons aussi constatés que plusieurs femmes étaient enceintes et que rares étaient celles qui acceptaient les contrôles prénataux.

Suite à cette analyse, et après avoir discutés avec les leaders du xapono, nous avons réalisés cinq réunions sur les thèmes de la diarrhée, les parasitoses, la gestion de l’eau, la prévention des problèmes cutanés et les contrôles prénataux. Ce travail fut réellement intéressant. Personnellement j’y ai pris beaucoup de plaisir, essayant de trouver, lors de chaque réunion, des manières ludiques pour aborder ces thèmes.

Après deux semaines, j’ai rejoins la professeur Nina, dans le xapono de Raita. Lors de notre passage en décembre, les Yanomami se trouvaient dans un xapono secondaire, situé à plusieurs heures de marche de la rivière. Maintenant ils sont de retour dans le xapono principal. A Raita, la situation de santé est difficile. Séjournant dans le xapono secondaire, l’accès aux soins était compliqué, le personnel de santé de la FUNASA
restant dans le poste de santé situé près de la rivière. De sérieuses répercutions découlèrent de ce relatif isolement. Du fait du manque de suivi de la croissance des enfants, la quasi-totalité de ceux-ci sont en état de dénutrition. Le problème de dermatose est également impressionnant, certains enfants ayant perdu de nombreux cheveux pour cause de plaies sur le cuir chevelu.

Lors de notre séjour à Raita, les Yanomami étaient particulièrement occupés, construisant un nouveau xapono. De ce fait, nous n’avons pu faire que peu de réunions. Cependant à chaque fois, j’ai été frappée par l’intérêt montré par les Yanomami et leur participation a toujours été forte. Certains moments ont aussi été comiques comme par exemple lorsqu’un leader traditionnel explique, avec grande gestuelle, ce qu’est d’avoir des parasites intestinaux.
Troisième xapono visité, Puckima Beira. Mon séjour dans ce village a été court, quelques jours seulement. Nous avons ensuite rejoint Silvio Cavuscens, coordinateur général de la Secoya, pour un nouveau voyage, ceci afin d’introduire et de préparer un troisième court de formation pour leaders Yanomami, cours qui eu lieu les dernières semaines d’avril. Nous avons ainsi visité huit villages, le plus lointain se situant près de la frontière vénézuélienne. Dans chaque village, nous avons été témoins des nombreuses difficultés vécues par les Yanomami. Dans les postes de santé, le manque de médicaments et de matériel est chronique, le personnel médical n’est que peu présent et non préparé aux réalités du terrain, des épidémies, tel que la gale, sont ignorées et les cas de dénutrition infantile sont extrêmement fréquents.

Ce voyage a permis d’identifier de graves problèmes tant au niveau de la santé, que en ce qui concerne le respect des droits des indigènes. Certaines situations rencontrées ainsi que de nombreux témoignages ont reflétés une grande vulnérabilité des Yanomami. Cependant le court de formation pour les leaders, dont je relaterai le déroulement dans un prochain message, a révélé un fort potentiel d’union et d’organisation entre les xapono. Ceci laisse espérer à plus de droit et de dignité pour le futur.